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Chaos de bouts
18 février 2007

ARLP

Elle était très jeune, vingt-et-un ans à peine, et déjà un corps de femme, avec une incroyable poitrine qui aurait pu la gêner, mais qu’elle portait fièrement au devant d’elle. Parfois un décolleté laissait apercevoir des gouffres délicieux où j’allais bientôt me perdre.

Tout avait commencé quatre ans auparavant. Elle avait rencontré un garçon de deux années son aîné, et qui avait été son premier amour. Celui qui dure toujours. Enfin, c’est ce que l’on prétend. En tout cas quand elle découvrit, un an plus tard, « qu’il la trompait », elle passa une période sombre où elle se mit à grossir et pendant laquelle elle pleura beaucoup, avant de se résoudre à lui écrire une lettre d’ « amourupture » qu’elle me fera lire un soir de décembre, alors que nous venions de faire l’amour. Mais j’anticipe. Elle était plutôt bien sentie cette confession et le prétendu amoureux fut un peu décontenancé par ce courrier d’un genre auquel il ne semblait pas habitué. Il tenta de revenir dans les bonnes grâces de la demoiselle qui ne s’en laissa pas compter. D’autant moins que j’avais, entre temps, eu l’occasion de lui donner quelques clés en matière de relations amoureuses.

Le temps passa. Celui de l’oubli pour elle, celui de la découverte pour moi. Car cette histoire avait jeté un pont entre nous. Plutôt un fil, ténu, imperceptible pour un oeil non averti, aussi subtil que celui que l’araignée tire derrière elle, qui semble incongrue et inutile dans l’espace, mais qui est la base de cette architecture complexe que sera la toile, un piège souple, impitoyable et incroyablement résistant. En matière d’amour, la comparaison est totale. Cette période qui suivit la rupture fut pour nous l’occasion de tisser des liens discrets et apparemment anodins. Connivences d’abord, des instants que nous partagions au milieu des autres qui ne comprenaient pas toujours tel ou tel rire, telle ou telle gravité soudaine. Nos regards se croisaient et nous savions, d’un seul coup, ce qu’il en était de nous, de nos pensées, de notre envie. Il nous arrivait parfois de partir alors, sans raison évidente, pour étudier une partie de son cours ou bien consulter sur Internet un site qui nous intéressait. Car à cette époque elle étudiait et je l’aidais. Oh, n’allez pas croire que c’était sans nuages. Quand elle baissait les bras, qu’elle se considérait la plus nulle, qu’elle était persuadée qu’elle finirait caissière dans un centre commercial, je me fâchais, je la secouais, je lui disais ces quatre vérités et parfois même un peu plus. Mais en règle générale, elle était studieuse et j’avais une âme d’enseignant. Elle réussit son baccalauréat avec une mention, ce qui la remplit de bonheur et réussit à me faire pleurer.

Et puis les vacances d’été apportèrent leur lot de rencontres et de ruptures, de joies insensées et de chagrins insurmontables. Enfin, elle reprit les cours, apaisée, et décidée à poursuivre son parcours universitaire. Elle eut vingt ans, puis vingt-et-un ; quelques amants et puis plus rien.

« J’ai envie que tu m’apprennes la jouissance, le plaisir, la tendresse, les caresses ; celles que l’on donne, celles que l’on reçoit. J’ai envie que tu m’apprennes l’amour. » Elle était là, debout à la porte de mon bureau et je ne l’avais pas entendu arriver. C’était l’été et elle était très belle, à peine vêtue d’une robe tellement légère qu’on aurait pu la tenir roulée au creux de la main. Un soutien-gorge aux bretelles invisible faisait s’ouvrir son décolleté et le tissu plaqué contre ses cuisses ne cachait rien du renflement touffu et sombre de son sexe. Elle semblait ne rien porter d’autres que ces deux vêtements. Comme je restais assis à la regarder, un peu décontenancé par sa demande, elle s’approcha, déjà sûre d’elle et, appuyant ses seins contre ma bouche ajouta : « je crois que tu sauras m’apprendre. »

J’ai souvent revu les images de ce film tout en nuances qui dura deux années. Nous nous retrouvions où les circonstances nous le permettaient. C’était sans préambule. La chambre, le pré, la clairière au milieu d’une forêt, une caravane, un bateau, l’arrière d’une voiture, où que nous soyons nous n’avions qu’une hâte, nous prendre et nous transpercer l’un l’autre. D’abord très vite, comme pour conjurer le sort qui nous avait tenu éloigner. Et puis, tout doucement, nous prenions le temps de déguster. J’adorais lécher longtemps ses bras, ses aisselles qu’elle tenait lisses comme des fesses de bébé. Quand elle se tournait, ses seins m’étouffaient et je me laissais défaillir, à la limite de l’asphyxie. Elle aimait alors entreprendre une longue chevauchée, certaine de sa beauté. Elle se laissait descendre doucement sur mon sexe et m’éperonnait à peine, du rond de ses talons. Elle aimait, disait-elle, la fermeté de mes cuisses qui lui écartaient les fesses à chaque fois que mon bassin la soulevait un peu. Moi je me délectais de sa poitrine qui me masquait en partie son visage et qui s’ornait, de chaque côté d’un rideau de longs cheveux ondulant au rythme profond d’un galop qui se finissait par un orgasme où nous perdions pied, qui la désarçonnait, qui me laissait vide et pantelant tandis qu’elle finissait de lécher ce qui s’était perdu dans sa chute.

Un jour, parce que c’était dans l’ordre des choses, ma jolie cavalière changea de monture, abandonnant ma force tranquille pour un animal plus jeune et plus fougueux, préférant ses voltiges splendides et surprenantes à nos longs galops amples et lents. Elle avait acquis les standards indispensables et gagné en assurance. Moi j’avais vécu hors du temps et du désir, juste pour le plaisir.

Parfois, quand nous nous rencontrons, elle m’avoue regretter nos tendres ballades silencieuses et intimes dans ces chemins secrets où nos corps se perdaient. Je crois qu’elle dit ça simplement pour me faire plaisir.

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